29/11/2009

La Reine Albermarle ou le dernier touriste.

Revenons à nos amours de jeunesse.

On lira aussi, en parallèle, le très bon ouvrage de Mme le Professeur S.Basch intitulé Paris-Venise 1887-1932 (publié chez H.Champion, en 2000), et celui de J.-L. Moreau intitulé Sartre, un voyageur sans billet (publié chez Fayard).


La Reine Albemarle ou le dernier touriste: fragments. J.-P. Sartre.


Le 10 septembre 1951, son ouvrage sur Jean Genet est presque achevé, Sartre rejoint Michelle Vian pour un voyage en Italie qui passera par Naples, Capri, Rome et Venise. Sur Venise, le récit prendra la forme d'un journal1.

Mais s'il choisit l'Italie, c'est parce que l'Histoire est là: histoire récente et Italie d'après-guerre; Italie de l'Antiquité et du Quattrocento. Le Touriste est donc, à l'instar d'un témoin sartrien, celui qui sentira l'histoire qui se dérobe sous le regard. Ainsi, cette « Nausée de l'âge mûr », est le récit fragmentaire où le Touriste, comme Roquentin, chercher le secret des choses, la contingence et le temps. Le moteur de La Reine Albemarle est alors clairement défini puisqu'il est ce sentiment d'appartenance à l'Italie, à ses pierres, à ses lumières et à ses palais.

Mais qui est le Touriste? Sans doute Sartre lui-même, sauf que le Touriste vagabonde en solitaire. Cependant ce soliloque est nourri de la vie de l'écrivain: les promenades, les menus incidents sont datés du jour même où ils sont vécus. Il est le dernier Touriste à noter les changements vénitiens. Il est le dernier chasseur de rêve, de beauté et de sens; ultime et incertain rejeton d'une lignée d'écrivain commencée par Montaigne et qui s'étend jusqu'à Paul Morand2, (on pourrait même dire jusqu'à Philippe Sollers). Le Touriste est donc en quête d'un passé hors de portée, lequel devenu mythe ne peut qu'être un mythe.


1On notera d'ailleurs que Sartre est assez coutumier du fait, puisque déjà La Nausée reprenait cette forme.

2A ce propos, on lira avec profit Les Venises de P.Morand, « l'Imaginaire », Gallimard.


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